Représentation graphique du projet de loi de finances 2010
Je vous présente aujourd'hui le projet de loi de finances 2010 tel que rapporté par le Sénat dans son rapport, avec la ventilation des crédits de paiement (i.e. ce qui est affecté pour cette année) par missions - et non par ministères. Une surprise nous y attend, car une ligne budgétaire de ce budget est systématiquement retirée lorsque les médias produisent ce genre de graphiques, une ligne qui n'a rien d'anodin politiquement, tout comme par exemple celle concernant le remboursement de la dette de l'état.

Les chiffres en abscisse sont en millions d'euros, le nombre à droite correspond donc à cent milliards d'euros.
On constate sans surprise que les trois principaux postes de dépenses - en dehors du premier - sont consitués, en regroupant un peu, par les enseignements scolaire et supérieur, la défense et la sécurité intérieure, ainsi que le service de la dette.
Quelques remarques en vrac :
- La recherche est mélangée avec l'enseignement supérieur, ne permettant pas d'avoir une idée précise des crédits alloués.
- Les subventions dévolues aux médias de tous ordres n'ont rien de négligeables, étant supérieures au budget des grandes institutions - ligne "pouvoirs publics" - ainsi qu'aux sports et à la jeunesse.
- Les politiques du logement et de l'emploi - hors abattements de charges ou d'impôts - sont tellement faibles que cela confine au ridicule. Dans un pays qui compte pourtant quatre millions de chômeurs déclarés et qui a un besoin criant de centaines de milliers de logements sociaux, on voit bien ici que ce ne sont absolument pas des priorités pour le gouvernement nonobstant les déclarations grandiloquentes qu'affectionnent nos hommes politiques.
- Le niveau de la dette, quoique non négligeable, est largement supportable pour le moment si l'on considère le budget total. Il l'est encore plus si, à l'instar d'un Jean-Michel Aphatie, on aime à comparer l'état français à une personne physique... il suffit de se souvenir de ce qu'on recommande aux personnes qui empruntent pour acheter un logement - environ un tiers du revenu en remboursements.
Mais la vraie surprise, c'est la ligne budgétaire numéro un, établie à environ 94 milliards d'euros. Cette ligne intitulée "remboursements et dégrèvements" correspond, je vous le donne en mille, aux centaines de niches fiscales et remboursements d'impôts divers aux particuliers comme aux entreprises. C'est à dire que la ligne budgétaire la plus lourde pour la France, et de très loin, largement au-dessus du service de la dette par exemple, est constituée par tous ces petits arrangements votés au fil du temps et des réformes pour satisfaire des intérêts restreints et des politiques gouvernementales diverses et variées.
Je suis peut-être un odieux populiste, mais il me semble que la masse financière de cette ligne budgétaire est préjudiciables à plusieurs titres. Non seulement elle semble montrer que le poids acquis par toutes les niches fiscales - aux particuliers comme aux entreprises - est devenu trop monumental pour être ignoré ; mais surtout cela retire énormément de visibilité quand à l'efficacité de l'action et des dépenses gouvernementales - dépenses remplacées ici par des non-recettes - , souvent pour favoriser tel ou tel secteur ou groupe social.
Comme le réclamait avec lucidité - 94 milliards ! - un François Bayrou en 2007, l'abolition de l'intégralité de ces niches fiscales devenues excessivement pesantes pour les finances publiques et la clarté de la répartition des dépenses me semble clairement à l'ordre du jour. Même si cela devait être pour réinvestir le tout - on pourrait en garder un bout pour servir la dette - , cela permettrait de redonner de la visibilité dans lesdites dépenses et la mesure de leur efficacité. Et peut-être, qui sait, augmenter un peu le budget ridiculement faible dévolu à la construction de logements...
PS : Par ailleurs, c'est également ce que le Sénat fait remarquer dans cette page du rapport. On peut y lire notamment que pour les sénateurs ayant contribué audit rapport, "L'objectif d'une identification précise et complète des dégrèvements ou remboursements doit être clairement fixé" , à défaut d'avoir le courage politique de demander une suppression partielle ou totale de celles-ci.